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Porc « J’ai repris l’élevage de mon patron »

Après vingt-deux années comme salarié sur l’exploitation porcine d’Alain Martel, Bertrand Rosselin lui a succédé.

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Alors que nous visitons la maternité, la complicité au travail entre Alain Martel et Bertrand Rosselin saute aux yeux. Sans se parler, chacun prend son couloir pour soigner les truies et racler les déjections de la case. Après vingt-deux ans de travail en commun, les habitudes reviennent au galop. Le 1er janvier 2020, Bertrand a repris l’exploitation porcine d’Alain à son départ à la retraite, après y être entré en 1998 comme salarié. L’élevage, situé à Muel, en Ille-et-Vilaine, est spécialisé en naissage et compte 280 truies. Les porcelets partent à 8 kg pour être engraissés à façon chez des prestataires locaux.

Alain s’est installé en 1991 en créant un élevage de porcs de toutes pièces sur les terres de la ferme familiale. « J’ai démarré avec 140 truies, en construisant un bloc verraterie-gestante-maternité, et installé la quarantaine dans l’ancienne étable. J’avais un collègue qui achetait tous les porcelets pour les engraisser », raconte le jeune retraité.

 

Le hangar abrite le matériel, la paille et quelques truies gestantes. © I. Lejas

Un outil fonctionnel

Le système fonctionne bien. En 1996, l’éleveur décide de doubler son effectif pour passer à 280 truies en rallongeant son bâtiment, de façon à assurer la totalité des besoins de l’engraisseur. Changement d’orientation en 2005 : l’engraisseur rencontre des difficultés et doit cesser d’acheter la totalité des porcelets. Une solution est rapidement trouvée. Avec l’aide de ses partenaires – Crédit agricole, Cooperl AA, Coop du Garun –, Alain décide d’engraisser la totalité de sa production en façonnage. Cette option s’avère économiquement intéressante.

Il n’a pas fait le choix d’investir sur place. « La construction d’une porcherie d’engraissement représentait un investissement conséquent. Je n’avais pas non plus le plan d’épandage suffisant », justifie Alain. Cela aurait également nécessité d’embaucher de la main-d’œuvre complémentaire aux côtés de Bertrand.

Ce dernier est arrivé sur l’exploitation en 1998, peu de temps après le doublement du cheptel, au départ à mi-temps entre deux exploitations, puis à plein temps. « J’ai appris le métier ici », confie-t-il. Il connaissait l’exploitation depuis toujours. Ses parents habitent le hameau à côté de la ferme de la Touche Legault. « À quinze ans, je donnais un coup de main l’été », ajoute Bertrand. Il y a fait un stage pendant ses études agricoles pour l’obtention de son BTA.

Les derniers gros investissements, de 80 000 euros, datent de 2011, avec l’obligation de mise en liberté des truies gestantes. Comme il fallait de la surface supplémentaire, Alain a créé quarante nouvelles places sur paille en construisant un hangar, en y réservant une partie pour le matériel et une autre pour le stockage de la paille. À compter de cette date, le chef d’exploitation a été soucieux d’entretenir son outil fonctionnel. « Je me suis dit qu’il fallait qu’il soit en état pour pouvoir le céder le moment venu », souligne-t-il.

S’entendre sur la reprise

Alain et Bertrand ont commencé à parler de la cession il y a près de quatre ans. Alain savait que son fils unique n’était pas intéressé. À son départ à la retraite, Bertrand avait le choix entre rester salarié ou devenir son propre patron. À quarante-cinq ans, il a préféré opter pour la deuxième solution. « Je savais où je m’engageais, mon épouse était d’accord, dit-il. Nous avons rénové une habitation à 200 mètres du site. »

L’exploitation a été estimée et les deux parties ont trouvé un terrain d’entente. La banque a suivi. « Les risques sont minimisés grâce à de bons critères techniques et une bonne structure financière, en lien avec un juste prix de reprise sur les bâtiments et les animaux – stock au prix de revient – », estiment cédant et repreneur.

Depuis six mois, c’est donc Bertrand qui est aux commandes. Contact avec les prestataires, relations avec les fournisseurs… Il lui reste encore beaucoup à découvrir et « ces derniers temps, les semaines font plutôt 70 heures que 35 heures ». Il a aussi des projets en tête. « Mon souhait est de regrouper la quarantaine et l’infirmerie plus près du site sous trois ans », confie-t-il. D’ici à la fin de l’année, sa priorité va se porter sur la biosécurité. Bertrand prévoit de clôturer les silos et de rendre les portails étanches pour constituer un bloc élevage fermé. Après quelques mois « la tête dans le guidon », il vient d’embaucher une salariée car il tient, comme son prédécesseur, à un confort de vie. Cette belle aventure humaine s’achève sur une transmission réussie.

Isabelle Lejas

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